INTERVIEWPourquoi le jeûne intermittent peut apporter « un bénéfice pour la santé »

Régime : « Le jeûne intermittent peut apporter un bénéfice pour la santé »

INTERVIEWLe professeur nantais David Jacobi donne une conférence sur cette pratique de plus en plus populaire, ce jeudi soir
Une assiette vide. Illustration
Une assiette vide. Illustration - SIPA / SIPA
Julie Urbach

Propos recueillis par Julie Urbach

L'essentiel

  • Très à la mode, le jeûne intermittent consiste à sauter un repas ou en tout cas à « réduire la fenêtre d’alimentation au moment le plus adapté pour l’organisme », explique à 20 Minutes David Jacobi.
  • Des périodes de repas davantage en phase avec notre horloge interne, ce qui permettrait d’améliorer sa situation métabolique et de mieux réguler son appétit, selon l’expert.

Parfois appelé « fasting », le jeûne intermittent est une pratique de plus en plus populaire qui consiste souvent à sauter le petit-déjeuner ou le dîner dans un objectif de perte de poids. Que se passe-t-il dans notre corps pendant cette privation ? Ce type de jeûne est-il recommandé ? Les réponses avec le professeur David Jacobi, enseignant, chercheur et médecin spécialiste en nutrition à l’Institut du thorax. Il donne ce jeudi soir à Nantes une conférence grand public intitulée « Jeûne intermittent, quand les hormones se mettent à table », en marge du 38e congrès de la société française d’endocrinologie qui se tient jusqu’à samedi.


David Jacobi
David Jacobi - Institut du thorax, W.-A. Desveaux

Quel lien existe-t-il entre l’appétit et les hormones ?

Rappelons d’abord qu’une hormone est un produit fabriqué par le corps qui l’aide à fonctionner et à s’adapter à toute situation auquel il est soumis. Derrière les sensations d’avoir faim ou d’être rassasié se cache donc tout un cortège d’hormones. Elles communiquent notamment des messages issus de plusieurs organes, comme le tube digestif (estomac, intestin) ou le tissu gras, vers le cerveau qui va ainsi pouvoir réguler la faim et la satiété de manière adaptée. Par exemple, l’appétit est stimulé par la ghréline, et freiné par la leptine.

C’est cette dernière qui nous dit quand il faut s’arrêter…

Les hormones participent à nous faire manger la quantité dont nous avons besoin et idéalement pas plus. Mais nous mangeons aussi par plaisir, parce que c’est bon ! Nous pouvons aussi exercer un contrôle volontaire et décider de nous restreindre, dans une stratégie de perte de poids. Mais ce n’est pas toujours très efficace, car il est difficile de tenir la distance…

Moins contraignant, le jeûne intermittent est une pratique de plus en plus répandue, et à laquelle vous vous intéressez. Pourquoi ?

Le jeûne intermittent remporte un certain engouement car on contrôle le moment plutôt que les quantités, une approche pour perdre du poids tout en se privant moins. C’est d’autant plus intéressant que les connaissances scientifiques semblent confirmer son intérêt. Un petit-déjeuner à 6 heures du matin et un dîner à 22 heures, avec un jeûne nocturne très court, n’est manifestement pas très bon pour la gestion de votre poids et plus largement pour votre santé métabolique (pression artérielle, taux de sucre, cholestérol…). Une manière de faire du jeûne intermittent est donc de réduire la fenêtre d’alimentation au moment le plus adapté pour que l’organisme absorbe, digère et intègre les nutriments. De très récentes études ont d’ailleurs montré que les prises caloriques du matin participent à un meilleur rassasiement par rapport aux mêmes prises caloriques le soir. Il serait donc plus efficace de conserver le petit-déjeuner plutôt que le dîner, même s’il peut être plus simple de faire l’inverse par rapport à son organisation personnelle, sociale ou familiale.

Quels sont les mécanismes qui entrent en jeu ?

Ce que l’on cherche à faire, c’est à avoir des moments de repas en phase avec notre horloge interne (appelée horloge circadienne), qui gère tout le fonctionnement harmonieux du corps sur 24 heures. Le rythme quotidien est divisé en deux grandes phases de sommeil et d’éveil, et le jeûne intermittent est un moyen de bien respecter le jeûne nocturne. Un des grands problèmes des temps modernes, c’est que la vie, sociale ou professionnelle, peut perturber nos rythmes naturels : on a de l’éclairage artificiel, des réfrigérateurs, de la nourriture disponible à tout moment...



Quels sont les bénéfices si on y arrive ?

Respecter ces rythmes permet d’améliorer sa situation métabolique. Par exemple, vous aurez un meilleur fonctionnement de l’insuline et serez plus sensible à son action. Une bonne chose car cela peut diminuer le risque d’avoir du diabète. Un des bénéfices serait une meilleure régulation de votre appétit. On sait aussi que la perturbation des rythmes va avoir un impact sur l’humeur, la fatigue, voire la dépression. Là encore, le fait de manger bien rythmé fait probablement partie d’une bonne hygiène circadienne et peut participer à améliorer la qualité du sommeil, géré par deux autres hormones : la mélatonine (qui favorise l’endormissement) qui augmente le soir et diminue le matin et le cortisol (l’éveil), qui fait l’inverse.


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Vous recommandez donc le jeûne intermittent à vos patients ?

Nous sommes dans un contexte où les maladies métaboliques sont de plus en plus fréquentes dans la population : l’obésité, le diabète de type 2… Donc il faut se poser la question des nouveaux conseils que l’on peut être amené à donner. Le jeûne intermittent, fait de manière raisonnable (par exemple en respectant un jeûne nocturne de 12 heures au minimum avec des horaires les plus réguliers possible) avec une alimentation équilibrée, peut permettre de restructurer les prises alimentaires pour un bénéfice sur la santé. Je suis par contre beaucoup plus prudent à recommander des formes de jeûne plus prolongées, le niveau de preuves scientifiques étant beaucoup plus faible.

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